Le CD à 10 pistes

Avec l’apparition du CD, au milieu des années 80, le vinyl s’était grandement raréfié jusqu’à sa quasi disparition au début des années 90. Ce nouveau support permettait de stocker 74 minutes de musique quand l’ancien proposait seulement, selon la qualité, entre 40 et 60 minutes. Ce gain de temps imposa aux artistes d’enregistrer des albums plus longs avec souvent, une moyenne de 12 morceaux. Les fans de tous bords eurent alors la joie de retrouver, sur chaque LP de leurs groupes préférés, au minimum 2 titres supplémentaires, ce qui reléguait du coup le vieux disque microsillon et sa courte durée au rencart.

 Comme toute bonne chose a son revers, on déchanta très vite et on se rendit rapidement compte qu’il était très difficile, à quelques rares exceptions, de produire un chef-d’œuvre ou même un très bon album voire tout simplement un bon album avec un format à 12 chansons. Force fut de constater que, pour la grande majorité, les titres supplémentaires n’étaient ni plus ni moins que des plages de remplissages souvent indignes des morceaux forts des albums. Est-ce qu’Highway to hell d’AC/DC serait devenu un chef-d’œuvre avec 12 morceaux ? C’est certainement un très mauvais exemple tant le groupe, à l’époque, était hors normes et capable de ne composer que des chansons indispensables. Et les Smiths avec The queen is dead ou les Echo & the bunnymen et les 9 titres d’Ocean rain. Alors bien sur, il y a les contre-exemples : les Pixies avec Doolittle, Radiohead avec Ok computer, … mais avec le recul, si l’on fait un bilan sur un panel conséquent d’albums sortis directement en Compact Disc, on pourra sans problèmes vérifier cette théorie. Sans entrer dans le débat selon lequel, d’après les puristes, le vinyl restituerait plus fidèlement les oeuvres musicales, il faut reconnaître que l’ère du 33 tours a engendré un nombre plus conséquent de grandes pièces maitresses de l’histoire du rock.

Toutefois, avec le revival du vinyl au début des années 2000, il semble que cette tendance soit en train de s’inverser et qu’à nouveau, les artistes soient enclins à revenir à des enregistrements plus courts avec des CD ne comptants plus que 9 ou 10 titres. Alors il est vrai que de nos jours, la notion de CD devient abstraite et que finalement le nombre de chansons a peu d’importance quand on télécharge sur son smartphone seulement les pistes qui nous intéressent. Mais il est aussi vrai qu’une production, pour un artiste, marquera plus facilement son temps si elle se concentre uniquement sur l’essentiel en se délestant de ses quelques morceaux superflus…